L’état amoureux, une initiation ?

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L’état amoureux, une initiation ?

Pascal Patry astrologue et thérapeute à Strasbourg 67000
Publié par Pascal Patry dans Psychologie des profondeurs · 18 Juin 2022
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L’état amoureux, une initiation ?

12/02/2023 : Rajout d'éléments à l'article du 18/06/2022

La rencontre amoureuse, à des profondeurs diverses et variées (imagination 1er degré, inspiration 2e degré et intuition 3e degré), c’est le paradis retrouvé. Ce paradis que nous avions connu au cours de notre vie intra-utérine.

Après une vie bercée dans un bonheur océanique au creux de la mère, c’est le choc de la naissance, événement qui cause un bouleversement radical avec le premier cri de l’enfant. C’est l’expulsion à partir de laquelle commence alors une longue et interminable attente au cours de laquelle notre âme nostalgique nous taraude dans la solitude de notre être, jusqu’au jour, un jour béni et tout ensoleillé où l’amour nous saisit et nous offre une fois encore le paradis.

Si cette nostalgie du paradis ne se fait pas immédiatement sentir dans la tendre enfance, c’est que l’enfant se sent encore enveloppé par sa mère, par sa voix, par les battements rythmés de son cœur lorsqu’elle le pose contre sa poitrine, par le sentiment de sécurité et d’amour qu’elle lui voue en lui donnant son sein lorsqu’il a faim. Tous les sens du bébé, par la tendresse de la mère, sont comblés par son toucher, son regard, ses odeurs, sa voix enveloppante, rassurante et sécurisante.

La présence de la mère, son comportement à l’égard de l’enfant, vient contrebalancer la catastrophe de la naissance où le contact avec l’extérieur devient dur, là où auparavant, l’enfant flottait dans un liquide chaud, balancé tendrement par les mouvements. Une fois expulsé, l’enfant se trouve à ce point de non-retour où il fait froid, où pour lui les lumières sont violentes et les bruits assourdissants. L’insécurité ressentie est renforcée par l’angoisse des nouvelles sensations inconnues et perçues au contact du monde extérieur.

Un long chemin de développement physique et psychique va mener l’enfant vers l’époque de l’adolescence, puis vers la jeune vie d’adulte, où le sentiment de solitude et d’incompréhension face au monde va aller croissant. Autant de sentiments qui feront resurgir inconsciemment la nostalgie de l’unité avec la mère.

Mais la nostalgie de l’unité avec la mère, n’est-elle pas aussi celle de l’unité avec le Tout ?

La naissance n’est-elle pas la reproduction de la chute hors du Paradis terrestre, où avant d’entrer dans la matière, l’Homme vivait encore au sein d’un monde spirituel ?

Vient alors, peut-être, le jour ensoleillé de la rencontre amoureuse qui marque la fin de la séparation et de l’insoutenable solitude de l’être. Soudainement, c’est le coup de foudre, c’est la passion qui saisit l’être tout entier et qui commence alors à projeter sur l’autre, sur l’être aimé, tout son cœur et toute son âme.

Plus on aura cultivé un idéal avant ce moment inattendu, où la lumière entre dans l’âme, et plus cet idéal sera projeté sur l’autre avec force, plus l'être sera transporté vers les hauteurs. Et c’est bien, au cours de la vie, n’est-ce pas, que cette recherche de l’idéal, que cette aspiration à l’idéal nous fait tendre vers lui, le chercher et peut-être le trouver.

Le chemin de vie qui suit la naissance est un chemin jalonné de multiples souffrances et ce sont ces dernières qui peuvent former le terreau de l’idéal — la voie de la sublimation si on emploie un terme issu de la psychanalyse.

L’âme garde en elle, au-delà du poids du monde qui pèse sur elle, une lumière, si ténue soit-elle, une lumière qui parfois s’éteint et n’est plus qu’espérance.

A contrario d’une âme qui se porte vers un idéal, nous aurons une âme qui hélas cultivera haine et rancœur voire vengeance. Si tel était le cas, ce serait ces dernières caractéristiques qui seraient projetées. Il est donc important qu’au cours de la croissance, l’enfant ait une figure d’idéal vers laquelle il peut tendre et aspirer. Pour le chrétien, cette figure idéale est le Christ.

Il est intéressant de constater que la rencontre amoureuse confirme notre existence. En effet, jamais on ne se sent aussi vivant que durant ces instants de grâce, laquelle grâce va même jusqu’à arrêter le temps.

Cet état de plénitude vécue est souvent attribué à la présence de l’autre, alors que l’autre n’a été qu’un élément déclencheur permettant à l’idéal cultivé en soi de devenir un véritable « moteur d’extraction de soi » : « Je donnerai mon cœur pour elle, pour lui ». On est ici devant un don d'amour pur, le même don par lequel les trônes se sont sacrifiés, sacrifice par lequel notre Cosmos a débuté. Le sens de l'amour

C’est peut-être en ces instants que les paroles : « Aime ton prochain comme toi-même », prennent toute leur signification.

Il arrive souvent, que le coup de foudre soit unilatéral, que l’être aimé ne vive absolument pas les mêmes sentiments. Le coup de foudre peut littéralement nous faire sortir de nous-mêmes au point que ce n’est plus un retour dans l’utérus qui se produit, mais une expulsion dans le Tout.

L’être ainsi projeté hors de lui-même se retrouve, hors de son corps, dans la nudité la plus totale. En sortant ainsi de son propre corps, on peut parler d’une seconde naissance.

Cette seconde naissance est une naissance à soi-même, par laquelle sont dévoilés l’Alpha et l’Oméga, le potentiel évolutif de l’être.

On retrouve ici les paroles d’Erich Fromm, sociologue et psychanalyste américain d'origine allemande : « La tâche principale de l'homme dans la vie est de se donner naissance à lui-même, de devenir ce qu'il est potentiellement ».

L’état amoureux, comme chacun sait, a toujours une fin et cette fin peut-être plus ou moins douloureuse. Elle est douloureuse pour celui qui voit partir l’être aimé, douloureuse pour celui qui s’aperçoit que l’être aimé n’est pas ce qu’il en pensait et douloureuse enfin pour celui qui se voit expulsé une seconde fois du paradis terrestre !

C’est alors, quel que soit le cas de figure, que l’on se retrouve devant son Ombre – selon la terminologie de la psychologie des profondeurs –, ou devant le gardien du seuil – selon la terminologie de l’anthroposophie, car en dehors de l’état amoureux, où le cœur s’allume, on est à nouveau confronté à l’opacité qui nous sépare du véritable état d’être qui vient d’être vécu.

Il nous faut alors apprendre à réduire la distance qui nous mène à nouveau à nous-mêmes en affrontant nos propres démons. Le soleil du cœur, le bien-être vécu est à nouveau recherché, mais cette fois en pleine conscience.

Il arrive un moment où nous n’avons plus la force de l’élan qui nous a aidés à nous projeté hors de nous-mêmes – hors de notre ego –, et sans cet élan nous n’avons plu la force de faire persister l’état amoureux afin de demeurer au contact de la source d’amour, la part lumineuse de notre être, celle qu’à "tort", nous attribuons à autrui, faute de comprendre ce qui, dans ces moments de grâce, se produit réellement pour soi.

C’est ici que les paroles du psychiatre Carl Gustav Jung prennent tout leur sens :

« Nous sommes ce couple de jumeaux, dont l’un est mortel et l’autre immortel, qui sont toujours ensemble et qui pourtant ne peuvent être totalement réunis. Les processus de métamorphose cherchent à nous rapprocher de cette relation intérieure ; mais la conscience éprouve des résistances parce que l’autre en nous paraît étranger et effrayant et, comme nous ne pouvons pas nous habituer à l’idée de ne pas être l’unique maître dans notre propre maison, nous préférerions n’être jamais que notre « moi » et rien par ailleurs. Nous sommes confrontés avec cet ami ou ennemi intérieur et il dépend de nous qu’il soit pour nous, un ami ou un ennemi ».

L’état amoureux a réuni dans l’éclair du coup de foudre ce couple de jumeaux, a fait se dissoudre l’ego, la distance qui nous séparait de nous-mêmes. Cette union qui nous a transporté une seconde, une semaine, quelques mois, atteint parfois un paroxysme, où l’on peut alors parler comme l’a fait Rudolf Steiner :

« En nous tous réside une faculté, mystérieuse et sans pareille, de laisser derrière nous tout ce qui change avec le temps pour nous retirer au plus intime de notre soi dépouillé de tout ce qui est venu l’envelopper de l’extérieur, pour y contempler, sous la forme de l’immutabilité, l’éternel en nous ».

Immortel pour Carl Gustav Jung, éternel pour Rudolf Steiner ; les mots ici s’équivalent où dans ces instants, comme le chante Céline Dion dans sa chanson « Le Ballet » : le temps s’arrête tant que dure la grâce.

Après la grâce, commence une situation obscure faite d’interrogation et de souffrance. C’est ici que va commencer la vraie vie la vie spirituelle mais il faudra réduire l’opacité, la distance qui sépare à nouveau les jumeaux, cette fois, non plus par un coup de foudre, mais par sa propre force, cette force même qui a été puisée lorsque nous avons touché à notre part de lumière à la source de l’amour.

C’est pourquoi, comme nous le dit Marie-Louise Von Franz – Disciple du psychiatre Carl Gustav Jung :

« On peut considérer que toute situation obscure (toute « maladie psychique ») dans laquelle on tombe est l’invite à une initiation, car elle nous plonge dans un lieu qui nous est propre et dont nous devons apprendre à sortir ».

"L’ex-amoureux" n’a qu’un désir : retrouver la lumière, retrouver le bonheur intérieur vécu lors de son expérience « passionnelle » qui par une exaltation l’a transporté hors de lui… en réalité… vers lui !

Bien des embûches attendent alors cet "ex-amoureux" tout au long de cette initiation, car il devra, par un travail sur lui-même, c’est-à-dire par un travail psychothérapeutique, dissoudre à nouveau son ego — celui-là même qui s'est disloqué lors du vécu amoureux.

Carl Gustav Jung nous dit :

« La psychothérapie est fondamentalement une relation dialectique entre le médecin et le patient. C’est une confrontation entre deux ensembles psychiques, où tout savoir n’est qu’un outil. L’objectif est la transformation, une modification non prédéterminée, et à vrai dire indéterminable, dont le seul critère est la disparition de ce qui a le caractère de l’ego. Aucun effort du médecin ne peut forcer ce résultat. Le médecin peut tout au plus montrer une voie au patient, afin que celui-ci prenne une attitude qui consiste à opposer une résistance minimale à l’expérience déterminante. » C. G. Jung, 1 984 - Cité par Paul Montangérand dans "La voix du cœur, chemin du thérapeute".

En résumé : l’être expulsé hors du sein maternel revit l’expulsion du Paradis, la puissance divine est à jamais perdue. L’enfant grandit et fait le constat que le monde est bien trop cruel pour lui. Sur les braises de son âme souffle un vent d’idéal né de la perte et de l’espérance.

Un jour sous l’effet d’un sourire, d’un parfum, d’un visage ou d’une attitude les braises deviennent feu ardent, la distance entre soi et Soi s’abolit et l’âme s’enflamme en se projetant hors d'elle même. "Je t'aime et j'ai l'impression de te connaître depuis toujours" [1].

La distance de soi à Soi se consume, l’être se rapproche à des degrés variables de la réalité divine qui est la sienne, se rapproche de son jumeau immortel, il exulte, un bonheur le transporte, le voile qui cachait les étoiles se déchire, le vécu paradisiaque lui est à nouveau donné, offert.

Si l’expérience atteint au Minuit des Mondes, les rouages de l’univers se dévoilent à l’âme, tout un monde archétypique où les architectes du monde travaillent à son édification est dévoilé.

La force qui a propulsé l’âme hors d’elle-même perd en intensité, l’âme retrouve son domicile corporel, elle y éprouve à nouveau la cruelle séparation.

Un seul désir s’empare d’elle, maintenant en pleine conscience (conscience qui n'était présente ni lors de l'expulsion du Paradis ni du sein maternel) : retrouver, en conscience donc, coûte que coûte ce monde perdu, tout faire pour que le gardien du seuil la laisse à nouveau passer, que l’Ombre soit métamorphosée en lumière.

Commence alors un long chemin d’initiation. L’amour ainsi vécu cède la place aux interrogations, aux questionnements, aux tourments parfois.

Les années de travail passent à qui n’a pas abandonné et un jour d’inattention, un jour de rêverie, en marchand au bord d’un ruisseau, le rideau se lève sur une fleur, un papillon, un nuage. Le voile, sans se déchirer complètement comme lors de l’expérience paroxystique, laisse entrevoir par de légères ouvertures une lumière qui parle de la fleur, du papillon et du nuage en un langage qu’aucun mot ne saurait prononcer. Le sentiment du retour de l’amour en l’âme renaît.

Le chemin se poursuit et au-delà de ce qui peut être dit, l’être s’enracine à la terre, à ses habitants tous les êtres, réapprend à les aimer avec une intensité croissante ; il a perdu ses illusions, il s’est délesté de ses phantasmes, il abandonne ses mécanismes de défense, couche après couche comme on pèle l'oignon du malheur.

L'être marche désormais sous la lumière des étoiles, se frayant un chemin vers sa demeure qui est un ici et maintenant, une présence éternelle à soi et au monde, cette présence que l'état amoureux lui avait fait revivre.

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Pascal Patry
Praticien en psychothérapie
Astropsychologue et psychanalyste

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Lire également ci-dessous le premier chapitre du livre de Rudolf Otto, Le Sacré.

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Définition : Chronique de l'Akasha

Rien ne peut se passer dans le monde sans laisser d'empreinte dans le monde Spirituel.

Tout ce qui se passe dans le monde physique et sensible a son écho dans le monde spirituel.

Le mouvement de la main n'existe pas seulement tel qu'on le perçoit, mais derrière la main sensible que nous voyons se trouve par exemple la pensée et la volonté qui font mouvoir cette main.

Pendant le moment furtif de l'impression sensible, l'image réflexe s'inscrit dans le monde spirituel où demeure toujours gravée son empreinte ; de sorte que lorsque nous avons la vue clairvoyante - par l’imagination, l’inspiration puis l’intuition -, nous pouvons suivre tous les événements qui se sont passés dans le monde visible grâce aux empreintes qu'ils laissent dans l'invisible. Rien ne peut arriver dans ce monde sans laisser d'empreinte (...).

Aussi, lorsque l'investigateur occulte décrit les événements de Palestine ou les observations faites par Zoroastre, il ne décrit pas ce qui se trouve dans la Bible ou les Gathas, mais ce qu'il sait lire lui-même dans la Chronique de l'Akasha.

Et ensuite il recherche si ce qu'il a déchiffré se trouve aussi dans les documents anciens. Ainsi l'investigation occulte est absolument indépendante des documents et c'est pourquoi elle ne cherche en dans les anciens documents que sa confirmation.

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Conséquences de la lecture Akashique :

Impression de connaître l'être aimé depuis toujours, mais également ce qui est relaté maintenant par une psychiatrie naissante ou nouvelle psychiatrie, qui s'intéresse aux expériences de mort imminente ou expérience extra-neuronale. Les expériences "où l'on perd la tête" (où l'on est en dehors du cerveau), exactement comme dans l'état amoureux.

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Le Sacré - Chapitre I

L'objectif de la présente reproduction est de montrer au lecteur deux faces d'une même pièce. D'une part le sentiment et lorsque je suis amoureux, "je suis entièrement sentiment" et d'autre part la raison qui découle du sentiment. Ainsi le cœur et le cerveau peuvent trouver une admirable cohabitation pour l'élévation de la conscience de l'être.

Un cas hors norme de notre histoire contemporaine est celui de Rudolf Steiner qui a réussi à nous expliquer le monde divin en des milliers de conférences à partir de sa seule expérience où il dit, dans son ouvrage "La philosophie de la liberté" :

C’était la nuit du 10 au 11 janvier, au cours de laquelle je n’ai pas dormi un seul instant. Je m’étais occupé jusqu’à minuit et demie de divers problèmes philosophiques, et me jetai enfin sur mon lit ; mon effort avait tendu l’an dernier à éprouver la vérité de ce que dit Schelling : « En nous tous réside une faculté, mystérieuse et sans pareille, de laisser derrière nous tout ce qui change avec le temps pour nous retirer au plus intime de notre soi dépouillé de tout ce qui est venu l’en­velopper de l’extérieur, pour y contempler, sous la forme de l’immutabilité, l’éternel en nous. » Je croyais et crois encore avoir, en toute clarté, découvert en moi cette faculté des plus intimes - n’y a-t-il pas longtemps que je l’avais pressentie ?

Le rationnel et le non-rationnel

1. Toute conception théiste, et d’une façon excep­tionnelle et prédominante l’idée chrétienne de Dieu, a pour caractère essentiel de saisir la divinité avec une claire précision et de la définir à l’aide de prédi­cats tels que ceux d’esprit, de raison, de volonté téléologique, de bonne volonté, de toute-puissance, d’unité d’essence, de conscience de soi et d’autres termes semblables.

Cette conception de la divinité correspond donc à la raison personnelle que l’homme trouve en lui-même, sous une forme limitée et réduite. Tous ces prédicats, appliqués au divin, sont considérés comme absolus, c’est-à-dire comme parfaits. Ils sont autant de notions nettes et précises, accessibles à la pensée et à l’analyse, susceptibles même de définition c'est tout l'objet de l'anthroposophie que de mettre de la clarté dans la pensée à propos des mondes spirituels ou mondes de l'esprit.

Si nous appelons rationnel un objet qui peut être clai­rement saisi par la pensée conceptuelle, l’essence de la divinité décrite par ces prédicats est rationnelle et une religion qui les accepte et les affirme est dans la même mesure une religion rationnelle. Ils sont les conditions nécessaires de la foi en tant qu’elle est une conviction qui s’exprime en notions claires, par opposition au pur sentiment. "Nous retirer au plus intime de notre soi dépouillé de tout ce qui est venu l’en­velopper de l’extérieur, pour y contempler, sous la forme de l’immutabilité, l’éternel en nous". Cette contemplation ne peut être vécue que dans la vie du sentiment. Voir article lié plus haut : La contemplation.

« Le sentiment, a dit Goethe, est tout, le nom n’est que son et fumée. » Ce mot de Faust n’est pas exact, au moins quand on l’applique au christianisme. Dans ce mot, nom est synonyme de notion. Or nous consi­dérons précisément comme un indice du degré et de la supériorité d’une religion le fait qu’elle comporte des notions et une connaissance. La connaissance que la foi possède du transcendant s’exprime dans des notions toutes ces notions de l'anthroposophie que Maurice Nouvel regroupera dans son Dictionnaire de christologie , celles que nous venons de citer et d’autres qui les complètent.

Le christianisme comporte des notions ; elles sont d’une clarté et d’une netteté supérieures et forment un ensemble complet. C’est un des caractères, non sans doute le seul ni même le principal, mais un des caractères essentiels qui marquent la supériorité du christianisme sur d’autres degrés et d’autres formes de la religion. Ce point doit être relevé tout d’abord et avec décision.

Mais il convient, d’autre part, de prévenir un mal-entendu qui conduirait à une appréciation étroite et erronée : ce serait de croire que les prédicats ration­nels que nous avons indiqués et ceux que l’on pour­rait ajouter épuisent l’essence de la divinité. Ce qui peut faciliter un tel malentendu, ce sont les expres­sions de la langue de l’édification, le monde de concepts dans lequel se meut l’enseignement reli­gieux sous la forme de la prédication et de l’instruc­tion catéchétique, ce sont enfin nos Saintes Écritures.

Là l’élément rationnel se trouve au premier plan, il paraît même souvent être tout. Mais comment en serait-il autrement ? Toute langue consistant dans des mots a pour but essentiel de transmettre des notions et plus les expressions seront claires et sans équivoque, meilleure sera la langue.

Mais si les prédicats rationnels sont généralement au premier plan, ils ne sauraient épuiser l’idée de la divinité, car ils se rapportent précisément à un élé­ment qui n’est pas rationnel. Ils sont des prédicats essentiels, mais synthétiques.

On ne comprend exactement ce qu’ils sont que si on les considère comme des attributs d’un objet qui leur sert en quelque sorte de support, mais qu’ils ne saisissent pas et ne peuvent saisir ; cet objet doit être perçu, mais d’une façon différente et particulière. Il doit être percep­tible d’une manière quelconque, sinon nous n’en pourrions rien dire. Le mysticisme lui-même qui appelle cet objet l'arrêton ne veut pas dire par là qu’il ne peut être perçu ; en ce cas, le mysticisme se réduirait au silence alors qu’en général il est particu­lièrement disert.

2. Nous nous trouvons ici pour la première fois en face de l’opposition du rationalisme et de la religion au sens profond du mot. Nous aurons souvent encore l’occasion de l’examiner sous ses divers aspects.

C’est dans cette opposition que se révèle le signe distinctif du rationalisme, son caractère premier, celui dont dépendent tous les autres.

On présente souvent comme le caractère propre du rationalisme la néga­tion du miracle et comme son terme antithétique l’affirmation du miracle. C’est là une erreur mani­feste ou tout au moins une conception bien superfi­cielle.

Qu’y a-t-il en effet de plus rationaliste que la théorie traditionnelle qui voit dans le miracle une interruption momentanée des lois naturelles, provo­quée par un Être qui est lui-même l’auteur de ces lois et doit en conséquence en être le maître. Beau­coup de rationalistes ont concédé ou même établi a priori la possibilité du miracle compris en ce sens, et beaucoup d’adversaires décidés du rationalisme sont restés indifférents à cette question.

Entre le rationa­lisme et la conception contraire il y a bien plutôt une différence qualitative qui réside dans la tendance d’esprit et les sentiments dont est faite la piété. Il s’agit de savoir si dans l’idée de Dieu l’élément rationnel l’emporte sur l’élément non rationnel ou même l’exclut complètement, ou si c’est l’inverse qui se produit.
L’orthodoxie elle-même, dit-on, a été la mère du rationalisme.

Cette affirmation renferme une part de vérité. Ce qu’il y a de vrai dans cette thèse, ce n’est pas le simple fait que l’orthodoxie s’est proposé pour fin la doctrine et l’enseignement doctrinal ; les mystiques les plus ardents l’ont fait eux aussi ; mais c’est le fait qu’elle n’a pas trouvé moyen, dans son enseignement, de sauvegarder l’élément non ration­nel de son objet. Elle n’a même pas su le maintenir vivant dans l’expérience religieuse. En le mécon­naissant si visiblement, elle a rendu l’idée de Dieu exclusivement rationnelle.

Cette tendance domine encore aujourd’hui ; elle ne règne pas seulement dans la théologie, mais aussi dans l’étude des religions où elle a pénétré à fond. Elle domine nos études des mythes, la recherche de la religion dite des primitifs, les essais de reconsti­tuer les origines et de découvrir les sources de la religion, etc.

Sans doute, on n’applique pas ici d’em­blée ces notions rationnelles supérieures qui nous ont servis de point de départ, mais on voit en elles et dans leur développement graduel le problème capi­tal et on leur donne comme infrastructure des repré­sentations et des notions de moindre valeur. Ce sont donc toujours des notions et des représentations que l’on considère, et de plus ces notions sont « natu­relles », c’est-à-dire appartenant au domaine général de la représentation humaine.

En même temps, on s’applique, avec une énergie et un art presque dignes d’admiration, à ne pas voir l’élément spécifique de l’expérience religieuse, tel qu’il se manifeste déjà dans les expressions les plus primitives de la religion. C’est admirable, tout au moins surprenant.

S’il y a en effet un domaine de l’expérience humaine où apparaît quelque chose qui est particulier à ce domaine et ne peut s’observer qu’en lui, c’est celui de la religion. C’est bien le cas de dire qu’ici l’œil de l’ennemi est plus perçant que celui de certains amis ou de théoriciens neutres.

Dans le camp adverse, on sait fort bien que toutes les « extravagances mystiques » n’ont aucun rapport avec la « raison ». En tout état de cause, cette cri­tique est un stimulant salutaire ; elle nous incite à remarquer que la religion ne s’épuise pas dans ses énonciations rationnelles et à mettre en lumière la relation de ses éléments de telle sorte qu’elle prenne clairement conscience d’elle-même. C’est ce que nous essayerons de faire en examinant la catégorie spéciale du sacré.

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[1] - L'impression de connaître l'autre depuis toujours trouve sa source dans le fait qu'il fut un temps ou l'humanité tout entière était Une. Selon la description de Rudolf Steiner, faites dans le cycle Mythes et mystères égyptiens :

Regardons maintenant la Terre elle-même. Lorsqu’elle contenait encore le Soleil et la Lune, elle n’était qu’une sorte de nébuleuse éthérique d’une immense étendue, renfermant les êtres humains qui s’animaient [2], et les germes endormis des autres êtres : animaux, plantes et minéraux.

Aucun œil humain n’eût pu percevoir ces êtres, parce que l’homme n’existait encore qu’à l’état de germe. Il n’avait donc point d’yeux pour voir ; c’est pourquoi ils ne peuvent devenir visibles que rétrospectivement pour le clairvoyant.

Cette description suppose un observateur imaginaire situé en un point de l’espace cos­mique. Sur l’ancien Saturne également, un œil physique n’aurait rien pu voir. En ce temps, la Terre en sa forme première n’était qu’un brouillard vaporeux, dont seule la chaleur était perceptible.

Au sein de cette masse, de ce brouillard éthérique originel, se forma peu à peu une sphère vaporeuse et lumineuse, qu’on aurait déjà pu voir, s’il avait existé à cette époque des êtres pourvus d’yeux.

Et si on avait pu y pénétrer, doué d’une sorte de toucher ou de sens de la chaleur, on aurait eu l’impression d’un espace chaud ; un peu comme la sen­sation que donne l’intérieur d’un four. Cette masse nébuleuse devint rapidement lumineuse. Et elle portait en elle tous les germes dont nous venons de parler.

Il ne faut pas commettre l’erreur de croire qu’il s’agit là d’un brouillard, d’une nuée comme ceux que nous voyons aujourd’hui ; toutes les substances qui sont maintenant liquides ou solides s’y trouvaient alors dissoutes.
Tous les métaux, tous les minéraux, tout était sous forme de vapeur, une vapeur trans­parente, lumineuse, un brouillard pénétré de chaleur et de lumière.

Essayez de vous représenter que vous baignez là-dedans. Le brouillard éthérique était devenu un gaz lumineux.
Celui-ci devint de plus en plus clair, et c’est la condensation progressive des gaz qui augmentait la lumière, de sorte qu’à un moment, ce brouillard prit l’apparence d’un grand soleil qui rayonnait dans l’espace cosmique.
Cela arriva réellement, au moment où la Terre contenait encore le Soleil, où elle était toute diaphane et où elle rayonnait sa lumière dans l’univers.

Cette lumière permit non seulement à l’homme de vivre sur la Terre sous la forme ébauchée originelle qu’il avait alors, mais aussi aux autres êtres supérieurs qui, sans avoir un corps phy­sique, sont liés à l’évolution de l’homme, les Anges, les Archanges, les Archées, etc.

Ceux-ci n’étaient pas seuls ; dans cette plénitude de lumière vivaient encore des êtres plus élevés qu’eux : les Puissances ou Exousiaï ou Esprits de la Forme, les Vertus ou Dynamis ou Esprits du Mouvement, les Dominations ou Kyriotetes ou Esprits de la Sagesse, et ceux que l’on appelle les Trônes ou Esprits de la Volonté ; enfin, moins étroitement unis à cette sphère lumineuse, se détachant d’elle de plus en plus, les Chérubins et les Séraphins.

La Terre était un corps céleste habité par toute une hiérarchie d’êtres sublimes plus ou moins élevés. Et cette lumière qu’elle émettait dans le monde, dont tout son corps était pénétré, ce n’était pas seulement de la lumière, c’était aussi ce qui devait devenir plus tard l’objet de la mission terrestre : c’était la force de l’amour.

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[2] - Source : Expériences extraordinaires de Stéphane Allix et Paul Bernstein, le manuel clinique d'une nouvelle psychiatrie : Expérience de mort imminente. Toutes les expériences décrites dans ce chapitre sont faites par la perception initiatique [3].

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[3] - Voir les 3 planches : Perception initiatique

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Description pour situer le Moi de l'Homme en dehors de son cerveau.


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1
commentaire

ARA
18 Jun 2022
Merci pour ce texte très éclairant et même programmatique qui me fournit la chandelle qu'il me faudra si ou quand le soleil se couchera!
Pascal Patry
Praticien en psychothérapie
Astropsychologue
Psychanalyste

5, impasse du mai
67000 Strasbourg

Mobile : 06 29 54 50 29

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